par Robic » 03 Mar 2014, 07:55
Je n'ai jamais mis les pieds en prépa, mais j'ai passé pas mal d'années à la fac (à la fin de mes études j'ai même animé des séances de travaux dirigés donc j'ai été des deux côtés) et je pense qu'on peut faire les mêmes observations.
Déjà, entre les génies et les gros bosseurs, je pense qu'il y a des intermédiaires... Mais effectivement, on peut se poser deux questions :
- pourquoi certains réussissent-ils mieux que moi sans travailler autant que moi ?
- pourquoi certains bossent-ils beaucoup et n'ont pas de résultats ?
Pour les deux questions, je dirai que c'est une question d'efficacité.
Si on met de côté les vrais génies (ils existent mais sont trop peu nombreux pour que j'en parle), je pense que la différence tient dans l'efficacité du travail : il est possible de travailler plus ou moins efficacement. Or on n'enseigne pas, ni au collège ni au lycée, comment travailler efficacement. Je pense même qu'on enseigne au collège de mauvaises méthodes : on fait croire aux élèves qu'il faut apprendre le texte du cours, et même d'apprendre certaines formules par coeur, ce qui est une perte de temps pour un bon élève. L'obligation d'apprendre des formules par coeur tient à mon avis du nivellement par le bas : un bon élève n'a pas besoin d'apprendre des formules par coeur, par contre ça peut servir de béquille à un élève moins doué.
On va me rétorquer : il y a quand même des formules à connaître par coeur, par exemple cos²x+sin²x=1. Oui, je suis d'accord. Je trouve même scandaleux qu'un étudiant ne puisse pas avoir le réflexe de remplacer cos²x-1 par -sin²x dans une équation où il n'y a que des sinus. Mais je n'ai pas dit qu'il ne fallait pas connaître des choses par coeur : j'ai dit qu'il ne fallait pas les apprendre. Un bon élève comprend pourquoi cos²x+sinx²=1 (il voit Pÿthagore sur le cercle trigonométrique) et le retiendra assez vite, après quelques exercices d'application. Comme il a compris la formule, qu'il a compris en quoi elle est utile, mieux : qu'il a compris qu'elle était importante, il la retient. L'élève moins doué n'a peut-être pas vu le lien avec Pythagore, ou n'a pas en tête le cercle trigonométrique, en tout cas il n'a pas saisi l'importance de cette formule et en quoi elle sera utile. En l'obligeant à l'apprendre par coeur, on augmente les chances qu'il pense à elle le jour où elle sera utile. En obligeant tous les élèves à adopter cette béquille, on fait du nivellement par le bas. (Comme si on obligeait tous les cyclistes à mettre les deux petites roues sur le côté...)
Quand j'étais au lycée, j'étais persuadé qu'on nous demandait d'apprendre le texte du cours, parce que c'était le cas au collège. Or je ne progressais pas. J'avais pourtant bonne conscience : j'ai appris le cours ! En fait seulement le texte du cours - je n'avais donc rien appris... C'est seulement en terminale que je me suis rendu compte que d'avoir fait plein plein d'exercices m'avait fait progresser : désormais, j'apprendrai mon cours en me focalisant sur les exercices (méthode qui m'a très bien réussi à la fac).
Et donc je reviens à mon idée de travail efficace. La bonne méthode, je crois, c'est 1. comprendre ce que dit le prof pendant la séance de cours, 2. lire le cours chez soi rapidement (juste pour savoir de quoi il parle), 3. faire/refaire les petits exercices de base. C'est durant l'étape 3° qu'on va vraiment commencer à comprendre le cours, donc à l'apprendre, et même à retenir les formules.
L'étape 1 est importante, c'est là qu'on peut gagner du temps (par rapport à ceux qui en perdent). Quand j'étais à la fac, je voyais beaucoup d'étudiants recopier le tableau avec retard, donc ils ne comprenaient pas ce qu'ils écrivaient, contrairement à moi qui recopiait en écoutant (je peux écrire très vite - très mal, mais très vite - et j'abuse d'abréviations, c'est un gros avantage) donc en apprenant déjà en partie le cours. Je crois que c'est un problème qui existe autant en fac qu'en prépa : je sais que certains étudiants passent leur cours à recopier au lieu d'écouter (et comprendre). Il ne faut pas avoir peur d'écrire mal. De toute façon le texte du cours ne sert à rien, ce n'est qu'un brouillon (il sert à produire des résumés de cours et des résumés des démonstrations). Les étudiants qui passent leur cours à faire du recopiage auront un retard important sur ceux qui ont écouté le prof : les premiers devront relire le cours et le recomprendre (et rattraper 1h de cours tout seul dans sa petite chambre, ça prend 2h...), les seconds auront juste à le relire rapidement avant d'attaquer la feuille d'exos.
Quant à l'étape 3, j'estime que c'est elle qui correspond au réel apprentissage du cours. C'est en faisant des exercices qu'on va vraiment le comprendre : pas seulement comprendre les définitions ou les propositions, mais comprendre en quoi les nouvelles notions sont importantes, saisir leur lien avec les autres notions, etc. Et bien sûr acquérir les bons réflexes. Là encore il faut éviter de perdre du temps en passant la séance de TD à faire du recopiage de tableau.
Donc, pour résumer les deux extrêmes :
- Certains étudiants ne savent pas prendre de notes. En cours, ils ont toujours un ou deux tableaux de retard. Leur cours de maths est en fait une séance de recopiage de tableau. Ils n'ont rien appris. Du coup, le soir ils doivent relire le cours. Le contexte est différent et il n'y a pas de prof pour faire des remarques pertinentes, du coup ils passent beaucoup de temps. Ajoutons qu'ils croient que l'important, c'est le cours. Ils passent donc du temps à essayer d'en retenir le plus possible, du moins de retenir le texte. Peut-être pour se donner bonne conscience, ou peut-être à cause d'une habitude qui leur avait réussie au collège, ils apprennent même des choses par coeur ! Une fois ce travail effectuée (il est sûrement plus de minuit), il reste à faire les exercices du jour. Forcément, ils rament, surtout qu'ils ne songent pas toujours à consulter les exemples du cours en cas de bloquage. Le lendemain, fatigués, ils ont du mal à écouter la correction vu qu'ils sont encore en séance de recopiage de tableau. Des exercices qu'ils n'ont pas su faire et dont ils ont mal écouté la correction vont devoir être révisés un jour ou l'autre à la maison s'il reste du temps... Si le prof les interroge sur le cours, ils parviendront sans mal à en débiter des extraits par coeur, mais ne pourront pas répondre aux questions intéressantes, ce qui découragera le prof...
- D'autres étudiants savent prendre des notes, ce qui leur permet d'écouter le prof : ils savent de quoi parle le cours, ils comprennent les remarques pertinentes ou les schémas. Le soir, ils relisent le cours rapidement pour se remémorer les propriétés (qu'ils ont déjà commencé à comprendre), et attaquent aussitôt la feuille d'exercices, le cours ouvert à côté afin de le consulter en cas de blocage. Comme ils ont le temps et qu'ils ont déjà digéré une bonne partie du cours, ils réussissent par eux mêmes une bonne partie des exercices, ce qui leur permet d'acquérir les réflexes et, au passage, de vraiment comprendre le cours, donc de vraiment l'apprendre. Ils se couchent pas trop tard et sont ainsi en pleine forme pour la correction du lendemain, qu'ils suivent attentivement, notamment pour les exercices qu'ils n'ont pas réussi et qu'ils comprennent cette fois. Quand le prof les interrogera sur le cours, ils répondront avec des mots à eux et hésiteront peut-être un peu, mais ce sera une vraie discussion de maths, et le prof retrouvera le moral !