Sake a écrit:Sauf que ton exemple ici me semble inadapté. Quand il est confronté à ce problème, l'enfant ne se voit pas proposer le choix de l'opération. Il se voit avant tout imposer la nécessité de trouver une méthode. La première chose qu'il se doit d'effectuer est de traduire mathématiquement l'énoncé, ce qui se fait plus ou moins inconsciemment et plus ou moins automatiquement.
Ca ne correspond pas à une méthode. Déjà l'intérêt d'un tel énoncé est de casser une des fausses représentations qui causent les difficultés : croire qu'il suffit de superposer ce que se passe avec la représentation sous forme d'action d'une des 4 opérations.
Ceci fait, tu gardes un problème de ce type parmi tes problèmes de référence.
Le traitement d'un problème similaire se fera par la mise en relation intuitive du problème posé avec le problème de référence. La seule traduction sur laquelle on peut mettre des mots est le fait de chercher ce qu'on avait avant d'enlever.
Un cheminement inconscient et rapide - immédiat - est l'apanage des esprits intelligents alors qu'un cheminement qui est automatique peut venir d'une répétition méthodique d'un raisonnement déjà employé auparavant.
Les premiers liens sont toujours une forme d'intuition, qui s'appuie davantage sur le langage que l'heuristique pure, mais sans permettre pour autant de mettre des mots précis tout de suite. Je préfère parler de "pratique" que de "répétition méthodique", car à vouloir tout rationaliser des apprentissages, les adultes finissent par les empêcher.
Une fois l'énoncé traduit, il doit saisir l'enjeu du problème : Que doit-on trouver ? Que doit-on montrer ?
C'est cette question qui devra le tarauder jusqu'à l'étape finale de son raisonnement, alors même qu'il n'en n'a pas encore posé les premières briques.
C'est très efficace pour le choix entre multiplication et division. Une fois qu'on est dans cette famille, les questions suffisent à terminer le choix.
C'est plus subtil pour le choix entre addition et soustraction, qui nécessite une prise en compte plus globale de l'histoire, alors que les enfants des ont des difficultés ont tendance à surinvestir sur un mot isolément, qui ne permet pas de choisir entre addition et soustraction.
Si l'énoncé est d'un type nouveau, la difficulté sera bien présente, puisqu'il faut d'abord outrepasser la surprise qu'engendre la nouveauté.
Ca dépend. Parfois la construction du concept opératoire qui s'opère peut faire que le nouveau s'avère curieusement évident.
En ce qui concerne le point principal que je discute, est-ce que le schéma précède l'opération ou est-ce le contraire ? La question ne se pose pas si l'élève maîtrise l'analogie qui existe entre ces deux représentations du raisonnement.
Ce qui revient à dire qu'une fois qu'on sait, la question de comment on peut l'apprendre se pose tout d'un coup beaucoup moins. Evidemment.
Le formalisme est une manière équivalente à celle qui consiste à traduire le problème en des situations visuelles et concrètes.
C'est là où je ferais une différence entre dessin et schéma. Quand l'enfant va faire un dessin, ça n'a souvent pas grand chose à voir avec un schéma en rapport avec un choix d'opération.
Je me souviens d'anciennes évaluations nationales de CE2 que j'avais aidé à corriger. Il y avait comme problème un truc du genre "
Papa et maman ont acheté un canapé à 253 euros et une lampe à 89 euros. Combien ont-ils dépensé ?". En dessous un cadre blanc pour que l'élève puisse faire ses recherches, calculs, dessins à la vue du correcteur. Et encore en dessous la phrase réponse à compléter du nombre voulu. Dans la pile de livret, il y a une fille qui avait écrit directement la bonne réponse dans la phrase, sans aucun calcul dans l'espace réservé, lequel contenait uniquement... le dessin d'une lampe et d'un canapé, avec un coup de crayon assez remarquable qui plus est...
Il ne faut pas se voiler la face, quand on dit aux enfants de faire un dessin pour résoudre un problème, soit ils ne le font pas, soit on obtient ce genre de dessin sans rapport avec le choix de l'opération.
Quand tu effectues une chronologie (possiblement inversable) entre "trouver l'opération" et "trouver le schéma de résolution", moi je vois un problème mal posé. Un élève ne pose l'opération que lorsqu'il a trouvé le schéma de résolution et jamais l'inverse, qu'il soit bon ou mauvais.
Le problème est un problème normal, en français, rien ne permet de dire qu'il soit "mal posé".
On ne peut parler de schéma de résolution que dans l'étape suivante où on apprend à traiter un problème en plusieurs étapes, avec plusieurs opérations successives. Là on est vraiment obligé de construire une trame avant de calculer, où on distingue ce que obtient à chaque étape et par quelle opération à chaque fois.
Mais quand il n'y a qu'une étape, il n'y a rien qui s'appellerait schéma entre l'histoire et l'opération. Il y a un lien qui s'opère entre la situation et un répertoire de situations déjà rencontrées, grâce au concept de l'opération lui-même. L'abstraction que constitue l'opération par elle-même est la seule passerelle, et vouloir y associer un schéma à ce stade ne peut produire qu'un doublon inutile, et qui ne fera pas plus passerelle que ce qui existe déjà.
Le meilleur des cas, à la limite, c'est l'élève qui trouve les deux presque instantanément, mais cela rejoint ce que je dis un peu plus haut dans ce même paragraphe : Il a maîtrisé la correspondance entre la mise en situation et le calcul.
Ce sont ceux qui savent déjà qui trouvent les deux en même temps. Quand tu travailles avec des élèves en grande difficulté, il y a un gros travail d'organisation qui prend du temps. Car l'élève a l'intuition de plusieurs opérations en même temps, qui ont toutes un fondement, mais encore faut-il remettre chacune à la bonne place.
Mais le schéma... lui, il est toujours présent.
Sur le choix d'une opération unique, il n'y a pas de schéma autre que l'opération elle-même. Donc sauf à rebaptiser "schéma" ce qui s'appelle déjà "opération", il n'y a pas de schéma.
Seulement il vient plus naturellement chez le doué - qui a par expérience ou par talent une bonne compréhension et une bonne intuition de la situation - et artificiellement chez celui qui a un peu plus de difficultés, car ce dernier a besoin soit de le construire sciemment (cheminer de la même manière que le doué mais un peu plus lentement) soit de faire appel à une analogie, et donc à sa mémoire.
Au début, c'est totalement analogique et pas du tout sciemment. Le sciemment, c'est ce que le doué dit pour justifier de ce qu'il a fait, souvent autrement.
Notons finalement que ce qui fait le doué, c'est aussi sa capacité à puiser dans une mémoire efficace, i.e. qui offre ses ressources de manière immédiate et précise. Car s'il a un cerveau capable de cheminements rapides et s'il a une bonne mémoire bien organisée, il sera sans aucun doute un logicien hors pair.
Et ceci passe par aucun autre biais que l'entraînement. L'entraînement crée les connections synaptiques de nos neurones, et c'est lui qui apporte à notre cerveau sa base de données : Notre mémoire.
Effectivement, c'est la pratique qui est centrale, et c'est souvent ce qui manque à l'école. J'ai déjà vu des classes où la résolution de problèmes s'enseignait en faisant des problèmes d'addition le lundi, des problèmes de soustraction le mardi, des problèmes de multiplication le jeudi... et finalement les élèves n'étaient jamais en situation de pratiquer des choix, il faisait une soustraction parce que c'était le jour des soustractions. Ils étaient censés apprendre à faire des choix en n'étant jamais en situation de choisir.
L'enseignement de théories formelles inapplicables prend aussi du temps aux dépens du temps de pratique.