Analyse dimensionnelle

De la mécanique au nucléaire, nos physiciens sont à l'écoute
Dominique Lefebvre
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par Dominique Lefebvre » 15 Oct 2008, 16:21

miikou a écrit:on resoud un simple systemen en raisonnant sur les dimensions ...

Et bien, développe cette démarche, c'est le but de la discussion!



Dominique Lefebvre
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par Dominique Lefebvre » 15 Oct 2008, 17:53

Rain' a écrit:3 méthodes pour justifier le résultat.

1) Par le théorème Pi, on a 4 grandeurs physiques et 3 dimensions indépendantes donc on peut construire un nombre sans dimension.

Il ne reste qu'à vérifier E*t²/(rho*r^5) est sans dimension

Bonsoir,
Le théorème en question est le théorème de Vaschy-Buckingam,pour la petite histoire.

Mais dis moi, d'où sort cette expression E*t²/(rho*r^5) ? Personne ne l'a indiquée ! C'est une hypothèse? Pourquoi cette hypothèse?



2) on écrit et on résout le système (youhou !! passionnant)

Quel système?


3) On cherche à éliminer à la main des dimensions qu'on ne veut plus pour ne garder qu'une longueur.

La masse ne s'exprime que pour l'énergie et la masse volumique avec des exposants identiques donc c'est forcément (E/rho) ou (rho/E) qui va intervenir.

La dimension de (E/rho) est .... * T^-2 or le temps n'intervient que pour t donc c'est E*t²/rho qui va intervenir dans la formule de r.

la dimension de E*t²/rho est L^5 donc r(t) = K*(E*t²/rho)^1/5.

Curieux comme démarche... ce n'est pas vraiment comme cela que je procéderais... Cela ressemble beaucoup aux recettes de cuisine dont on parle ici souvent, et qui sont honnies par tous!

Doraki
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par Doraki » 15 Oct 2008, 18:33

Dominique Lefebvre a écrit:Curieux comme démarche... ce n'est pas vraiment comme cela que je procéderais... Cela ressemble beaucoup aux recettes de cuisine dont on parle ici souvent, et qui sont honnies par tous!

Moi c'est comme ça que je résous des sytèmes simples...

On avait, M^a*L^(2a)*T^(-2a)*L^b*T^c*M^d*L^(-3d) = 1

On obtient le système en regardant les exposants de chaque unité :
M : a+d = 0
L : 2a+b-3d = 0
T : -2a+c = 0

On cherche à éliminer à la main des dimensions qu'on ne veut plus pour ne garder qu'une longueur.

Hmm dur d'interpréter ça.. si on cherche l'écriture de r en fonction du reste, ça veut dire qu'on cherche une solution où b=-1.

La masse ne s'exprime que pour l'énergie et la masse volumique avec des exposants identiques donc c'est forcément (E/rho) ou (rho/E) qui va intervenir.

a+d = 0 :
On remplace d par -a, ce qui revient à regrouper E^a et rho^d en un seul (E/rho)^a
La dimension de (E/rho) est .... * T^-2 or le temps n'intervient que pour t donc c'est E*t²/rho qui va intervenir dans la formule de r.

-2a+c = 0 :
On remplace c par 2a, ce qui veut dire qu'on est maintenant en train de regarder ((E*t²)/rho)^a / r.
la dimension de E*t²/rho est L^5 donc r(t) = K*(E*t²/rho)^1/5.

En effet après remplacements, on a pour L : 5a-1 = 0
Il faut donc choisir a = 1/5, et on a bien r(t) = K * (Et²/rho)^1/5.

Ma remarque sur les réactions chimiques à équilibrer, c'est que c'est le même genre de systèmes, souvent plus complexes que ça, et mes profs n'avaient aucun scrupule à utiliser ce genre de raisonnement. D'ailleurs je ne crois pas qu'on m'ait jamais demandé de justifier l'équilibrage d'une réaction.

Black Jack

par Black Jack » 15 Oct 2008, 19:14

La question subsidaire pourrait être, de quelle masse volumique parle-t-on ?
Cela ne change pas évidemment l'analyse dimensionnelle.

Mais pour estimer quantitativement l'énergie dégagée, il reste à connaître la valeur de la constante K et savoir quelle masse volumique de l'air il faut considérer, à quelle pression et à quelle température ? (qui varient fortement au cours du temps juste après le Boum).

L'analyse dimensionnelle peut montrer que la relation est fausse.
Si l'analyse dimensionnelle donne un résultat correct, cela ne signifie pas pour autant que la relation est correcte (peut être manque-t-il des composantes dans cette équation), et même si la relation trouvée est correcte, il reste à répondre à des questions telles que celles posées ci-dessus si on veut une réponse quantitative.

Mais ceci ne diminue en rien l'intérêt de l'analyse dimensionnelle.

:zen:

Dominique Lefebvre
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par Dominique Lefebvre » 16 Oct 2008, 12:03

[font=Verdana]Bonjour,[/font]

[font=Verdana]L’objet de cette discussion est de présenter l’analyse dimensionnelle à travers un exemple, afin que les lycéens en comprennent l’intérêt. Je ne suis pas certain que la lecture des posts précédents soit bien éclairante… Ils sentent l’enseignement actuel de la physique en prépa ![/font]

[font=Verdana] [/font]

[font=Verdana]Je vais donc essayer de résumer la méthode en la décrivant étape par étape, sur la base de l’exemple choisi.[/font]

[font=Verdana] [/font]

[font=Verdana]Taylor commence par émettre une hypothèse physique, sans doute sur des considérations thermodynamiques : l’évolution r(t) du rayon du nuage ne dépend que de l’énergie libérée E par l’explosion et de la masse volumique rho de l’air. C’est l’aspect physique de la démarche, qu’on ne va pas aborder ici.[/font]

[font=Verdana] [/font]

[font=Verdana]Nous sommes donc en présence de 4 variables physiques :[/font]

[font=Verdana]- Le temps t de dimension T[/font]

[font=Verdana]- Le rayon r de dimension L[/font]

[font=Verdana]- L’énergie E de dimension ML²T^-2[/font]

[font=Verdana]- La masse volumique rho de dimension ML^-3.[/font]

[font=Verdana]Et donc de 3 dimensions M, L et T.[/font]

[font=Verdana] [/font]

[font=Verdana]A partir de là, nous allons utiliser le théorème de Vaschy-Buckingam (le théorème « Pi » des ingénieurs), qui est l’un des fondements de l’analyse dimensionnelle. [/font]
[font=Verdana]Ce théorème dit : « Soit une loi physique de type x0 = f(x1, x2, …, xn-1) avec p dimensions indépendantes, alors on peut exprimer cette loi sous la forme d’une fonction g de la forme y0 = g(y1, y2, yn-p-1), les variables yi étant des nombres sans dimension. »[/font]
[font=Verdana] [/font]

[font=Verdana]Dans notre exemple, on a 4 variables et 3 dimensions indépendantes. D’après le théorème, on peut donc exhiber 4-3=1 nombre sans dimension et donc écrire que E^*r^b*t^c*rho^d = C une constante sans dimension. [/font]
[font=Verdana]Ou encore, en écriture dimensionnelle :[/font]
[font=Verdana] [/font]

[font=Verdana]M^a*L^2a*T^(-2a)*L^b*T^c*M^d*L^(-3d) = 1 [/font]
[font=Verdana][/font]
[font=Verdana]ou encore, en regroupant les termes :[/font]
[font=Verdana][/font]
[font=Verdana]M^(a+d)*L^(2a+b-3d)*T^(d-2a) = 1[/font]

[font=Verdana] [/font]

[font=Verdana]Il faut préciser d’où vient cette écriture E^a*r^b*t^c*rho^d = C. Taylor ne l’a pas sorti de son chapeau ! Il a cherché graphiquement à quel type de loi il avait à faire : linéaire, puissance, autre… Finalement, en traçant la courbe r en fonction de t sur un repère log, il obtient une droite. C’est donc une loi de puissance qui relie les variables en présence. Encore une fois, il faut signaler l’aspect expérimental de la chose… [/font]

[font=Verdana] [/font]

[font=Verdana]A partir de là, c’est relativement simple : je dois identifier a, b, c et d. [/font]

[font=Verdana]Je sais que mes dimensions sont indépendantes et donc que la puissance de chaque dimension doit être nulle. Je peux donc écrire le système suivant :[/font]

[font=Verdana]a + d = 0[/font]

[font=Verdana]2a + b +-3d = 0[/font]

[font=Verdana]d – 2a = 0[/font]

[font=Verdana]Sa résolution nous donne a = -d, b = 5d et c = -2d.[/font]

[font=Verdana]Si je reprends mon équation initiale, je peux l’écrire [/font]

[font=Verdana]E^-d*r^5d*t^-2d*rho^d = C soit (E^-1*r^5*t^-2*rho)^d = k^d avec k tel que k^d = C[/font]

[font=Verdana] [/font]

[font=Verdana]Et donc finalement E^-1*r^5*t^-2*rho = k [/font]
[font=Verdana]ou encore [/font]
[font=Verdana]r(t) = k^(1/5)*(E/rho)^(1/5)*t^(2/5)[/font]

[font=Verdana] [/font]

[font=Verdana]Cette formule, accompagnée des données expérimentales permet d’évaluer la valeur de E. Mais attention, il ne s’agit que d’une loi ad hoc. Elle n’explique pas pourquoi le rayon du nuage dépend de l’énergie dégagée et de la masse volumique de l’air ! Elle permet juste de faire des calculs ! René Thom a dit « Prédire n’est pas expliquer » ![/font]

[font=Verdana] [/font]

Black Jack

par Black Jack » 16 Oct 2008, 18:02

La méthode présentée par Dominique Lefebvre est celle que je préfère et que j'utilise personnellement dans les cas un peu compliqués.

Pour les cas simples (comme ici), on peut aussi faire une approche utilisant une méthode similaire à celle de l'équilibrage des réactions chimiques (comme il en a été fait allusion dans l'un ou l'autre des messages précédents).

On écrit une équation avec des exposants littéraux (1) et on cherche à d'abord équilibrer les dimensions qui n'apparaissent que dans 1 seul facteur du membre de gauche et 1 seul facteur du membre de droite.
Et on continue ainsi à équilibrer les dimensions une par une en tenant compte des résultats précédents.

Je le fais ici à la suite pour le problème posé.

E^1 = k * r^a * t^b * Rho^c (1)

- Le temps t de dimension T
- Le rayon r de dimension L
- L’énergie E de dimension ML²T^-2
- La masse volumique rho de dimension ML^-3

La dimension M du membre de gauche (E) ne peut être équilibrée dans le membre de droite de (1) que par la dimension M issue de Rho.
--> Rho est à la même puissance que E et donc c = 1

La dimension T^-2 du membre de gauche (E) ne peut être équilibrée dans le membre de droite de (1) que par la dimension T de t.
--> t est à la même puissance -2, b = -2

k n'a pas de dimension, on a jusqu'ici:

E = k * r^a * t^-2 * Rho

On en est donc à : ML²T^-2 = [r^a] * T^-2 * ML^-3
ML²T^-2 = [r^a] ML^-3T^-2

Et donc [r^a] = (ML²T^-2)/(ML^-3T^-2)

[r^a] = L^5

et comme [r] = L --> a = 5

Finalement, il vient : E = k * r^5 * t^-2 * Rho

r^5 = (1/k).E.t²/Rho

r = (1/k)^(1/5) * (E.t²/Rho)^(1/5)

Et en posant (1/k)^(1/5) = K (constante), on a :

r(t) = K * (E.t²/Rho)^(1/5)
**********
Ceci est écrit avec force détails pour faire comprendre, mais avec un rien d'habitude, on fait cela directement, en 1 seule ligne.

N'empêche, la méthode en passant par un système d'équations, comme expliqué par Dominique Lefebvre, liant les exposants marche à tous les coups et est recommandée dans les cas un peu ardus.

On peut d'ailleurs utiliser une méthode similaire (systèmes d'équations) pour équilibrer les équations de réactions chimiques, surtout les compliquées.

:zen:

 

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