par Skullkid » 14 Oct 2013, 22:29
Bonsoir, au risque de passer une nouvelle fois pour un petit con moralisateur, il faut arrêter de penser que la pédagogie est indissociable du politique. Le fait que les politiques de tous bords ont la fâcheuse habitude de vouloir imposer des dogmes en matière d'éducation est regrettable, mais ça n'empêche pas d'avoir des discussions qui portent sur la pédagogie. Cette discussion ouverte par Sourire_banane sur la méthode Cuisenaire a à mon avis tout à fait droit de cité, tant qu'elle ne déborde pas en polémique stérile (et pour l'instant ça n'est pas trop le cas, pourvu que ça dure).
Maintenant, il faut reconnaître qu'un sujet aussi complexe que la pédagogie est très propice aux débordements. Déjà parce que la tentation est grande de glisser des opinions politiques pourtant sans lien, mais aussi parce que l'écrasante majorité des membres n'a qu'une expérience limitée de la pédagogie. On a facilement tendance à généraliser à outrance (et il me semble que c'est surtout ça qui énervait Nightmare) parce que la pédagogie est un sujet très personnel : on a plus ou moins tous passé 10 ans à l'école, et la plupart d'entre nous se sert de ce vécu (10 ans c'est quand même pas rien !) comme base pour appréhender la pédagogie, voir les méthodes qui ont le mieux marché sur nous, etc. Dans certains cas (déjà assez rares sur ce forum), on va en plus se baser sur une expérience d'enseignement "actif" (Untel qui aide son gosse à faire ses devoirs, Untel qui donne des cours particuliers, Untel qui est prof), mais même-là ça reste limité. Même dans le "meilleur" des cas - celui d'un prof avec pas mal d'années d'enseignement derrière-lui - on ne voit jamais qu'un nombre plutôt limité d'élèves, et avoir affaire à une classe, c'est pas pareil qu'avoir affaire à un élève tout seul. Bref, en ce qui me concerne, le problème avec les discussions autour de la pédagogie c'est que tout le monde a tellement envie de présenter une solution comme la panacée, ou au moins comme "beaucoup mieux que ce qui se fait en ce moment", que ça dégénère très vite en gueguerre de religion. Genre beagle, tu dois bien être capable de partager ton opinion sur la pédagogie sans parler d'anesthésie de l'humanité ou de société malade, et sans céder aux tentations polémistes (si tu en es déjà à écrire ce genre de grandiosités alors que personne n'a encore, dans ce topic, montré une opinion opposée à la tienne, imagine à quel point ça peut s'enflammer)
Pour en revenir à l'ami Cuisenaire, la toute première question de Sourire_banane est d'après moi assez symptomatique. Pour exagérer un gros coup : "regardez comme ça a l'air super sur 10 élèves sélectionnés en tout bien tout honneur par l'huissier de Confessions Intimes et osez dire que les méthodes d'aujourd'hui sont pas toutes pourries !" (je sais bien que tu ne raisonnes pas du tout de façon si simpliste, Sourire_banane, je force le trait volontairement ^^). Je suis tout à fait d'accord avec vous quand vous avez mis le doigt sur deux choses :
- Une méthode à elle seule n'est rien, il s'agit d'y être formé et d'être conscient du contexte dans lequel on enseigne, ainsi que des effets à long terme, cf l'article cité par Archytas
- Il n'existe aucune méthode générale, cf les autres méthodes d'apprentissage des nombres que beagle a proposées
Je pense que la méthode Cuisenaire gagnerait à être connue, mais je suis sûr qu'on peut trouver des profils d'élèves sur lesquelles elle est complètement inefficace. L'intérêt des méthodes alternatives, c'est justement qu'elles sont alternatives : elles offrent une nouvelle voie si jamais on se retrouve confronté à un cas où les méthodes "conventionnelles" échouent. Dans la même veine, je suis sûr qu'on pourrait faire le même documentaire sur la méthode d'apprentissage de la lecture dite "globale", qui a pourtant montré des résultats désastreux (je ne dis pas que la méthode globale en elle-même est un échec, il y a très probablement une multitude de causes à ses mauvais résultats tels qu'on les constate aujourd'hui, parmi lesquelles la formation des enseignants).
Bref, tout ça c'est très compliqué, méfions-nous des affirmations péremptoires...