Le choix en mathématique

Discussion générale entre passionnés et amateurs de mathématiques sur des sujets mathématiques variés
Idriss
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Le choix en mathématique

par Idriss » 23 Mar 2020, 18:57

Salut,

Suite à une conversation* avec GaBuZoMeu, je vous propose d’approfondir le sujet ici.

En mathématique le choix, se manifeste dans les définitions et les axiomes, dans les noms, dans les pistes des justifications.

Voyez-vous d'autres lieux, en mathématique où il y a un choix ?

* : enigmes/autour-semblance-t216255-20.html#p1408303



Idriss
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Re: Le choix en mathématique

par Idriss » 26 Mar 2020, 16:31

Le choix dans les énoncés à réfuter ou à démontrer.

Le choix des concepts.

Idriss
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Re: Le choix en mathématique

par Idriss » 15 Avr 2020, 20:08

La construction des complexes, relèves d'un choix, en effet on a relaxé une contrainte, pour passer des réels aux complexes, en donnant une existence à la racine de -1.

Mais on aurait très bien, choisir de relaxer la contrainte d'avoir la commutativité, en introduisant le nombre anti-réel j tel que j*a=-a*j pour un a un réel...

Bref les choix sont tout le temps présent en maths, même là où on s'y attend le moins.

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Ben314
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Re: Le choix en mathématique

par Ben314 » 15 Avr 2020, 20:26

Salut,
A mon sens, c'est plus que très rare que dans les définitions et axiomes des maths ont ait un réel "choix".
Évidement, tant qu'on "parle dans le vide" sans prendre d'exemple, ça reste de paroles en l'air sans aucune valeur, mais vu que là tu prend l'exemple de la construction des complexes, on peu rentrer plus dans les détails en ce qui les concerne :
Si tu regarde l'histoire de l'invention des complexes, ben y'avais zéro le choix : en cherchant à résoudre les équations du 3 em degrés (à coeff réels), on s'est rendu compte que les méthodes de calculs envisagées demandaient fréquemment de déterminer des racines carrés de nombre négatifs. AU début, ça a bloqué presque tout le monde jusqu'à ce qu'un petit malin continue les calculs jusqu'au bout et constate qu'au final les racine de nombre négatifs disparaissent (des fois...) du résultat. Le calcul complexe était né.
Ensuite (en fait pas mal plus tard) on a justifié proprement qu'il n'était pas absurde de considérer un sur-ensemble C de R dans lequel les réel négatifs auraient des racines carrées. On a aussi montré qu'en fait tout les complexe admettent des racines carrées puis que C est algébriquement clos ce qui rend certains types de calculs bien plus simples dans C que dans R. Enfin, on a aussi montré que l'analyse, plus particulièrement la notion de dérivation, était infiniment plus simple (et plus rigide) dans C que dans R.
Et le bilan c'est que cet ensemble est devenu un "plus que classique" tellement il existait de domaine des mathématiques où il était bien plus simple de travailler dans C que dans R.

Et je le redit : à travers cette histoire (grandement simplifiée) des complexe, je ne vois nulle part de "choix" : juste un problème de départ à résoudre (le 3 em degrés) faisant naturellement apparaître un nouvel ensemble (les complexes) puis l'étude de ce nouvel ensemble montrant à quel point il est remarquable et utile.
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Re: Le choix en mathématique

par Idriss » 15 Avr 2020, 20:34

Prenons un exemple encore plus basique, que les nombres réels, parlons des nombres "naturels".
On aura tendance à dire que les nombres "naturels" (ceux décrits par l'axiomatique de Peano) sont naturels, mais rien n'est moins faux :

https://www.futura-sciences.com/science ... rois-4229/

En effet, il existe des groupement humains qui ont un plus grand nombre : beaucoup, ainsi ils n'utilisent pas et ne connaissent pas les nombres "naturels".

PS : On peut résoudre, de manière naturel, les équations du troisième degré sans imaginaire, en interceptant des paraboles avec des hyperboles.

L.A.
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Re: Le choix en mathématique

par L.A. » 15 Avr 2020, 21:45

Bonsoir,

pour moi, la question centrale serait :
Dans quelle mesure les choix en mathématiques sont-ils réels ou illusoires ?
Je pense en particulier au choix des axiomes, puisque le choix des noms n'a aucune incidence sur quoique ce soit, et le choix de tel ou tel méthode pour une preuve relève plus du goût ou de l'esthétique.

Ce que je vais dire est peut-être simpliste ou inexact, mais admettre un axiome, c'est se donner la possibilité de démontrer un théorème qu'on n'aurait pu ni prouver ni réfuter sans cet axiome. Par analogie, c'est comme éclairer un objet sous un certain angle pour faire apparaître certains détails. Quand on coupe ou on change l'éclairage, est-ce que l'objet existe toujours ? est-il toujours le même ?

Bien sûr, il faut raisonner en termes de système d'axiomes, de cohérence, d'équivalences entre certains axiomes et théorèmes, etc. Techniquement ces choses là me dépassent assez vite, mais je me pose des questions. Quelle est la portée, la profondeur d'une notion comme la cohérence ? Est-ce qu'elle implique une certaine forme d'unicité, et donc le caractère illusoire des "choix" qu'on ferait pour construire, compléter, enrichir un système d'axiomes ?

Ici je pense à l'hypothèse du continu : on peut admettre ou pas qu'il existe des ensembles compris entre N et R puisque c'est cohérent avec la théorie des ensembles. Mais peut-on admettre ceci d'un côté, et un autre axiome d'un autre côté, cohérent avec la théorie des ensembles mais pas avec l'hypothèse du continu ? En gros la cohérence est-elle une notion "transitive" ? et probablement tout un tas de méta-questions sur la méta-relation d'ordre qu'est l'implication logique.

Je pense aussi à la question des séries divergentes, où on peut appliquer certaines méthodes à certaines séries pour leur attribuer une valeur sans qu'il existe encore à ma connaissance de théorie globale nette à ce sujet.

Et si on peut empiler les axiomes, on peut aussi les séparer voir les décomposer, ce que tu appelles relâcher certaines hypothèses, l'exemple classique étant celui des géométries non euclidiennes obtenues en relâchant le postulat des parallèles. La question que je me pose est la suivante : un axiome peut-il être élémentaire, irréductible, indécomposable ? comment le savoir ?

Voilà, je n'ai peut être pas répondu à la question mais disons plutôt élargi le sujet... :mrgreen:

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Ben314
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Re: Le choix en mathématique

par Ben314 » 15 Avr 2020, 21:47

L'axiomatique de Peano, historiquement parlant, y'avais pas vraiment de choix non plus. Au moment où ça a été mis en place (par peano), ben ça faisait déjà des millénaires que des mathématiciens (et d'autres) faisaient des raisonnement arithmétiques en utilisant les "entiers naïfs" (qui sont ceux que manipulent les enfants dés le CP).
Et Peano, il voulait bien entendu que tout ces raisonnement préexistant soient valide dans son système d'axiome. Le but c'était essentiellement d'avoir un système minimal d'axiomes rendant valable tout les raisonnement fait précédemment hors d'un quelconque cadre axiomatique.
Et certes, il existe des "groupement d'humains" comme tu dit qui n'ont pas de mot dans leur langue pour exprimer de très grand nombres mais est-ce que tu crois vraiment que ces gens là pense qu'il existe un entier plus grand que tout les autres auquel on ne pourrait pas ajouter une unité ?
Sans parler du fait que je ne vois pas le rapport avec la choucroute : même s'il pensaient effectivement qu'il existe un entier plus grand que tout les autres, ben il me semble bien qu'ils n'ont jamais essayer de modéliser une axiomatique des entiers dans lequel il y aurait un plus grand entier. Et s'ils avaient essayer de le faire, ils se seraient immédiatement rendu compte qu'avec de tels axiomes la structure obtenue était quasiment sans intérêt vu le peu de résultats obtenus.

Essaye juste pour voir d'enlever un des axiomes de Peano (et éventuellement de le remplacer par autre chose) puis regarde ce que tu arrive à démontrer comme théorèmes avec ce nouveau système : ça te conduira forcément à revoir ta position concernant le fait qu'on "a le choix" quand on invente un système d'axiomes.
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Re: Le choix en mathématique

par Idriss » 15 Avr 2020, 22:25

L.A. a écrit:Ce que je vais dire est peut-être simpliste ou inexact, mais admettre un axiome, c'est se donner la possibilité de démontrer un théorème qu'on n'aurait pu ni prouver ni réfuter sans cet axiome. Par analogie, c'est comme éclairer un objet sous un certain angle pour faire apparaître certains détails. Quand on coupe ou on change l'éclairage, est-ce que l'objet existe toujours ? est-il toujours le même ?

Prenons l'exemple des entiers "intuitifs", disons que ce sont les nombres dont parlent Peano.

Mais alors pour les entiers "intuitifs", le théorème de Goodstein (c'est un indécidable de AP) est vrai ou faux ?

Non, les entiers "intuitifs" n'existent pas, ou pas complètement, ils se précisent, petit à petit, par des choix consensuels...
Modifié en dernier par Idriss le 15 Avr 2020, 23:11, modifié 1 fois.

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Re: Le choix en mathématique

par Idriss » 15 Avr 2020, 22:28

Ben314 a écrit:Essaye juste pour voir d'enlever un des axiomes de Peano (et éventuellement de le remplacer par autre chose) puis regarde ce que tu arrive à démontrer comme théorèmes avec ce nouveau système : ça te conduira forcément à revoir ta position concernant le fait qu'on "a le choix" quand on invente un système d'axiomes.


L'arithmétique de second ordre a pour conséquence les théorèmes de l'arithmétique de Peano (du premier ordre), mais elle est à la fois plus forte et plus expressive que celle-ci.

source : [url]https://fr.wikipedia.org/wiki/Arithmétique_du_second_ordre[/url]

PS : il n'y a pas que ZFC dans la vie :
[url]https://fr.wikipedia.org/wiki/Théorie_des_ensembles_de_von_Neumann-Bernays-Gödel[/url]
...

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Re: Le choix en mathématique

par lyceen95 » 16 Avr 2020, 00:22

Sur l'histoire des nombres complexes, ces nombres se sont révélés extrêmement utiles en physique en particulier. Leur intérêt est indéniable. Ce n'est pas le résultat d'un quelconque choix, c'est juste un outil de calcul très efficace.
Je ne vois vraiment pas le rapport entre ça et une question de choix.

Les maths, c'est fait pour simplifier les choses compliquées, et quand je lis cette phrase, je me pose des questions :
On aura tendance à dire que les nombres "naturels" (ceux décrits par l'axiomatique de Peano) sont naturels, mais rien n'est moins faux
Je pense que tu voulais dire l'inverse ?

L.A.
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Re: Le choix en mathématique

par L.A. » 16 Avr 2020, 06:46

Idriss a écrit:Mais alors pour les entiers "intuitifs", le théorème de Goodstein (c'est un indécidable de AP) est vrai ou faux ?

Non, les entiers "intuitifs" n'existent pas, ou pas complètement, ils se précisent, petit à petit, par des choix consensuels...


Possible... bon, je ne veux pas argumenter pour ou contre mais simplement comprendre, en partant du principe que je n'ai jamais rien pigé aux théorèmes de Gödel...
Est-on capable de donner un entier qui contredit ce théorème de Goodstein ? un majorant de cet entier ? je présume que non. Est-on capable de construire une théorie qui englobe N et qui permettrait de construire un tel entier ? A-t-on des exemples de théorèmes du même genre, indécidables dans N, qui auraient une preuve dans une théorie plus grande (comme ici les ordinaux) et une "contre-preuve constructive" dans une autre théorie ?

J'imagine qu'on est toujours sur des preuves par l'absurde, et je dois confesser que dans mes nuits d'insomnies, j'en viens parfois à me poser des questions sur la validité du principe du tiers exclus sur lequel on fonde les raisonnements par l'absurde. C'est aussi je crois ce que font certains chercheurs aussi qui travaillent sur une nouvelle logique à base de topos.

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Ben314
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Re: Le choix en mathématique

par Ben314 » 16 Avr 2020, 11:50

Idriss a écrit:Prenons l'exemple des entiers "intuitifs", disons que ce sont les nombres dont parlent Peano.
Mais alors pour les entiers "intuitifs", le théorème de Goodstein (c'est un indécidable de AP) est vrai ou faux ?
A mon sens, il n'y a pas photo : le théorème de Goodstein est on ne peut plus clairement indécidable pour les entiers "intuitifs".

Rappelons quand même le B-A-BA de ce qu'est un système d'axiomes (en particulier pour L.A. pour qui la notion semble mystérieuse).
Le "cas concret" le plus simple et le plus connu pour ceux qui ont fait un tant soit peux de math. c'est celui des groupes où la liste des axiomes est bien connue de tout le monde.
- Pour montrer que la théorie des groupes est consistante il suffit d'exhiber UN groupe donné (on parle de "modèle" de la théorie). L'existence d'un groupe prouve bien sûr que les axiomes ne sont pas contradictoires les uns avec les autres.
- Dans la théorie des groupe, si on considère la proposition C:"le groupe est commutatif", c'est à dire on peut facilement trouver un exemple de groupe commutatif ainsi qu'un exemple de groupe non commutatif. Et ça prouve qu'avec les axiomes de la théorie des groupes, il est impossible de démontrer la proposition C et qu'il est aussi impossible de démontrer la proposition non(C) : la proposition C est indécidable dans la théorie des groupes. Ce qui signifie qu'on peut rajouter C aux axiomes de la théorie des groupes sans créer de contradiction : cette nouvelle théorie (qui est la théorie des groupes commutatifs) reste consistante. Et, si on veut, on peut aussi ajouter non(C) à la liste d'axiomes des groupes.

Bref, il n'y a rien de compliqué ni de mystérieux à tout ça : le seul truc à bien comprendre c'est qu'une liste d'axiome caractérisant une théorie, ça ne désigne pas UN objet, mais de multiples objets vérifiant tous la liste des axiomes donnés. Donc par exemple, les axiomes de peano., ça ne parle pas d'UN ensemble (des entiers naturels), mais de différents ensembles. Et dire que le théorème de Goodstein est indécidable dans le système axiomatique de peano, ben ça veut juste dire qu'il est vrai dans certain de ces ensembles et faux dans d'autres exactement comme le fait d'être commutatif est vrai dans certains groupes et faux dans d'autres.

Et pour en revenir aux "entiers intuitifs", de nouveau, LE truc à bien comprendre, c'est que les "entiers intuitifs", ça ne désigne pas UN ensemble, mais de multiples ensembles vu que ça correspond en fait à une liste de propriétés qui sont celles utilisées depuis la nuit des temps comme étant les propriétés "intuitivement vraies" des entiers.
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Re: Le choix en mathématique

par L.A. » 16 Avr 2020, 12:34

Ben314 a écrit:Bref, il n'y a rien de compliqué ni de mystérieux à tout ça : le seul truc à bien comprendre c'est qu'une liste d'axiome caractérisant une théorie, ça ne désigne pas UN objet, mais de multiples objets vérifiant tous la liste des axiomes donnés. Donc par exemple, les axiomes de peano., ça ne parle pas d'UN ensemble (des entiers naturels), mais de différents ensembles.


Merci bien pour tes éclaircissements.

En effet, cela dit il me semble que si je prends pour N les trois axiomes (vus en prépa) :
- Toute partie non vide admet un pp élément
- Toute partie non vide majorée admet un pg élément
- Pas de pg élément
alors l'objet N est unique à bijection croissante unique près. Sur ces axiomes on peut construire l'addition (n+0 = n, n+1 = s(n), n+s(m) = s(n+m), etc.) puis la multiplication, puis l'exponentiation, puis la décomposition dans une base, puis énoncer le théorème. La bijection précédente est bien un isomorphisme pour toutes ces structures par construction, et de ce fait le théorème est vrai partout ou faux partout.

A quelle étape est-ce que je me trompe ?

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Re: Le choix en mathématique

par Idriss » 16 Avr 2020, 13:14

Ben314 a écrit:A mon sens, il n'y a pas photo : le théorème de Goodstein est on ne peut plus clairement indécidable pour les entiers "intuitifs".

Les entiers intuitifs sont un modèle d'entier de Peano, et à ce titre sont complètement déterminés, comme le groupe à 2 éléments est complètement connu.
Modifié en dernier par Idriss le 16 Avr 2020, 19:40, modifié 2 fois.

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Re: Le choix en mathématique

par GaBuZoMeu » 16 Avr 2020, 14:36

L.A. : tu ne te trompes pas, mais ce que tu décris comme système d'axiomes n'est pas un système d'axiomes du premier ordre : tu a des quantifications sur les parties de l'ensemble N.
Le théorème de Goodstein est indécidable dans l'arithmétique de Peano du premier ordre (où les quantifications ne portent que sur les entiers).

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Re: Le choix en mathématique

par Ben314 » 16 Avr 2020, 19:49

L.A. a écrit:En effet, cela dit il me semble que si je prends pour N les trois axiomes (vus en prépa) :
- Toute partie non vide admet un pp élément
- Toute partie non vide majorée admet un pg élément
- Pas de pg élément
alors l'objet N est unique à bijection croissante unique près. Sur ces axiomes on peut construire l'addition (n+0 = n, n+1 = s(n), n+s(m) = s(n+m), etc.) puis la multiplication, puis l'exponentiation, puis la décomposition dans une base, puis énoncer le théorème. La bijection précédente est bien un isomorphisme pour toutes ces structures par construction, et de ce fait le théorème est vrai partout ou faux partout.

A quelle étape est-ce que je me trompe ?
Le problème, c'est que tes axiomes parlent des parties de N donc il y a deux possibilités :
- Soit tu veut un système d'axiome "self contain" et il faut que dans ta théorie tu ne parle pas uniquement de l'ensemble N des entiers naturels, mais que tu parle aussi d'un autre ensemble P correspondant intuitivement à l'ensemble des parties de N et que tu rajoute des axiomes "liant" les éléments de ces deux ensembles. Et dans ce cas, si tu part de deux couples (N,P) et (N',P') satisfaisant tout les deux les axiomes de peano plus ceux "liant" N à P (et N' à P') alors tu n'arrivera absolument pas à montrer qu'il y a une bijection entre les deux.
- Soit tu considère que tes éventuels modèles de la théorie de Peano sont tous construit à l'intérieur d'un unique modèle plus gros (comme ZFC) dans lequel la notion de parties d'un ensemble est déjà définie et là, effectivement, tu peut te contenter de définir ta théorie en ne donnant à la base que l'ensemble N vu que ton gros modèle (ZFC) te donne automatiquement un P(N) "associé" à un N donné. Dans ce cas, effectivement, dans UN modèle donné de ZFC tu va avoir (à isomorphisme près) un seul modèle des entiers naturels. Sauf que bien entendu, des modèles de ZFC, ben il y en a plusieurs vu qu'il y a des tas de trucs indécidables dans ZFC (modulo de supposer que ZFC est consistant)

Pour te donner l'exemple à mon avis le plus connu, c'est celui des construction de l'analyse non standard où on se retrouve avec deux ensembles N (des entiers dits "standards") et *N (où on a rajouté des entiers dit "illimités") et qui sont en fait tout les deux des modèles de l'arithmétique (en un certain sens : tu peut aller voir "l'axiome de transfert" si ça t’intéresse d'avoir une vision plus "carrée" du bidule).
A première vu, ça sent la contradiction plein pot vu que l'ensemble N des entiers standards est non vide, est "contenu" dans *N, est majoré dans *N (par n'importe quel entier illimité) et pourtant il n'admet pas de plus grand élément. Sauf que ce n'est pas contradictoire avec l'axiome "Toute partie non vide majorée admet un pg élément" du fait que N n'est pas une partie de *N (en fait pour utiliser les vrais mots, ce n'est pas une partie interne de *N), donc il n'a pas a vérifier les axiomes de peano.

Bref, le truc peu-être pas évident à accepter au début, c'est que la notion d'ensemble (et donc de "parties d'un ensemble"), c'est pas du tout un truc naif du style "n'importe quelle collection d'élément de l'ensemble". Dans toutes les théories (en particulier dans ZFC), une collection absolument quelconque d'objet ne forme pas systématiquement un "ensemble" dans le sens que cette collection d'objet n'est pas obligé de vérifier les axiomes de ZFC relatifs aux ensembles.
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Re: Le choix en mathématique

par Idriss » 16 Avr 2020, 20:19

L'existence de plusieurs arithmétiques connues, est la preuve que plusieurs choix sont possible, même pour l'arithmétique.

Dire de AP qu'elle est la seule arithmétique, qui remplie tel et tel cahier des charges...

Je rappelle que AP peut-être formulé de plein de manière différente, donc même pour exprimer AP il y a plusieurs jeux d'axiomes possible.

Enfin, AP serait l’arithmétique la plus prolifique (au niveau des résultats que l'on peut y démontrer), mais qui vous dit que l'on ne vas pas découvrir une arithmétique nouvelle et plus riche que AP (par exemple en changeant un axiome par un autre).

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Re: Le choix en mathématique

par L.A. » 17 Avr 2020, 05:37

OK, c'est limpide, merci bien !

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Re: Le choix en mathématique

par Ben314 » 17 Avr 2020, 11:13

Idriss a écrit:L'existence de plusieurs arithmétiques connues, est la preuve que plusieurs choix sont possible, même pour l'arithmétique.
Pour moi, le fait qu'il y ait eu pas mal de tentatives de définition axiomatique des entier dont un bon nombre ont en fait conduit à des modèles équivalent constitue plutôt un preuve du "non choix" que l'on a concernant l'arithmétique : a ton avis dans le monde, parmi les chercheurs produisant des preuves en arithmétique, il y en a quel pourcentage qui utilise un système d'axiome autre que celui de Peano ?

Là où par contre il y a effectivement eu plus de choix, c'est en ce qui concerne la théorie des ensemble où, naïvement parlant, on aurait envie de dire que n'importe quelle collection d'objets constitue un ensemble. Sauf que ça conduit au paradoxe de Russel et qu'il faut donc "limiter" le nombre d'ensembles en décrétant que seules certaines constructions produisent des ensembles. Concernant les construction "de base" (du style l'intersection de deux ensemble), il est clair qu'il faut l'accepter si on veut que dans cette théorie les résultat basique des math soient démontrable, mais pour des construction "plus fines" comme celles autorisées par l'axiome du choix, ce n'est pas clair de savoir s'il faut les prendre ou pas et là, il y a effectivement un vrai choix concernant le fait d'accepter ou pas l'axiome du choix : si on le prend, ça permet évidement de démontrer plus de résultats dont certains très intéressant (par exemple le théorème de Théorème de Hahn-Banach). Sauf que si on le prend, ben ça permet aussi de démontrer des trucs du style théorème de de Banach-Tarski qui est totalement contraire à l'intuition.
Mais bon, des situation comme celle là où on a un réel choix sont on ne peut plus exceptionnelles en mathématique : je ne connais pas d'autre axiome qui soit aussi "polémique" que celui là.
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Re: Le choix en mathématique

par Idriss » 17 Avr 2020, 13:48

Ben314 a écrit:a ton avis dans le monde, parmi les chercheurs produisant des preuves en arithmétique, il y en a quel pourcentage qui utilise un système d'axiome autre que celui de Peano ?

Oui, je pense comme toi, que l'étude de Peano ou équivalent est majoritaire.

Mais à ton avis, penses-tu qu'il soit impossible, qu'en changeant un axiome de AP par un autre, on découvre une arithmétique nouvelle, strictement plus riche que AP ?

Selon moi le choix est toujours possible, et ce qui fait que l'on ne le voit pas c'est notre uniformité idéologique, on pense tous à peut prés de la même manière, ce qui nous cache pas mal de possibilité.

 

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